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L'annonce de la faillite

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Les vertus de la crise

Par Augustin Van Achter

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Pierre a 28 ans. Face à lui, un entrepreneur flamand qui lui fait visiter son entreprise de panneaux pleins destinés à la fabrication de châssis. Les machines, les techniques de collage, Pierre prend note de tout. Il comprend que ces panneaux sont l’avenir du châssis en Belgique. Son cerveau est en ébullition. Pourquoi ne pas lancer une société de fabrication de panneaux pleins en Wallonie ?

Pour envisager l’agrandissement de son entreprise, une chose et non des moindres était encore à régler. Le rendez-vous avec la banque pour l’octroi d’un crédit. Ce jour-là, le dialogue est constructif. La banque semble disposée à dégager les fonds nécessaires à un nouveau bâtiment pour l’entreprise. Pierre ne souhaite pourtant rien laisser au hasard. Il souhaite se prémunir d’une éventuelle montée du prix de l’aluminium, matière première de ses panneaux. Les banquiers le rassurent : «  Sur les trente dernières années, aucune crise n’a été constatée sur le marché de l’aluminium ». Pierre ferme les yeux. Il fait aveuglément confiance... 

          5h30 du matin. Tout d’un coup, son téléphone sonne. Au bout du fil, la femme d’un de ses employés : « Allo monsieur Moulin ! Malheureusement, mon mari ne saura pas travailler aujourd’hui. Il est malade ».  Pierre est furieux : c’est le cinquième appel du même type depuis le début de la matinée. Avec cinq travailleurs en moins sur dix-huit, c’est sûr la journée va être pourrie ! « Je suis le patron mais sans les avantages ! », rumine-t-il. Déjà en septembre, pour la rentrée des classes, il avait tenu la boîte tout seul pour permettre à ses employés d’accompagner leurs enfants. Pierre est vidé, exténué par cette situation. 

Milieu du mois d’octobre 2007, l’hiver est bientôt là. L’heure est au remplissage de la cuve de mazout. Pierre, qui avait pour habitude d’utiliser le mazout de son entreprise, peine à présent à remplir sa cuve d’une capacité de 6000 litres. Le jour de la livraison du carburant, un sentiment de honte l’envahit. Quelques jours auparavant, il était déjà gêné de téléphoner au marchand de mazout pour commander 500 litres. Pierre avait l’habitude de cacher du pognon un peu partout. Dans sa voiture, dans des armoires, etc. Les fonds de tiroir, les dernières économies, tout y passe pour réunir l’entièreté de la somme demandée. Le jour du plein, Pierre préfère s’effacer. Il veut éviter l’humiliation. Il laisse l’enveloppe avec l’argent sur la table de la cuisine et s’en va. Il ne veut pas assister à l’aveu de son propre échec. 


Finalement, suite à une décision politique, Pierre abandonne son travail d'auditeur énergétique. Il a une nouvelle idée ! Il veut lancer un site de vente en ligne destiné à l'installation et à l'entretien des systèmes de ventilation dans les maisons. Il est persuadé de la réussite du projet. Est-il plus heureux qu'avant ? Oui.Il ne se laisse plus manger par son activité. Et en plus, il ne doit plus d’argent à personne. Et pour couronner le tout, sa relation familiale est au beau fixe. Voici le conseil qu’il donnerait aux plus jeunes qui souhaiteraient se lancer : « Pour réussir, il faut être sérieux et débrouillard ! Et surtout ne jamais prendre les choses pour acquises, car on peut vite tout perdre ». 

2 octobre 2007, Pierre assiste à la levée de la faillite de son entreprise en présence de son personnel et du curateur nommé par le tribunal. La veille, accompagné de sa femme, il avait déposé le bilan au tribunal de commerce. La faillite est annoncée. L’homme qui n’est plus propriétaire, plus patron souhaite repartir avec son véhicule. « Non, impossible ! », lui dit-on. Même son GSM est confisqué. Le plus dur est le regard de l’ensemble de ses employés. D’ailleurs, aucun membre du personnel ne propose de le reconduire. Il est blessé dans son orgueil. L'homme laisse éclater ses émotions : « Celui qui ne pleure pas en vivant cette situation n’est tout simplement pas humain ». 

Pierre est aux anges ! Il vient d’être nommé certificateur énergétique en Wallonie et à Bruxelles. La fin de plusieurs mois d’études et de formations coordonnées par le Forem. « Les formations du Forem, on peut dire ce qu’on veut dessus, mais c’est l’idéal pour les personnes qui désirent se relancer. Dans mon cas, cela m’a sauvé ! ». Pierre est d’autant plus heureux que ces formations ne lui ont presque rien coûté grâce au système des chèques formation. Très vite, son activité devient rentable.